« Quand, au lendemain d’un match pourtant facile, tu demandes à ta femme de passer le permis de grutier en accéléré pour t’aider à te sortir du lit. Quand, une fois le pied par terre, tu sens tout de suite que la journée va être compliquée. De bas en haut et de gauche à droite, rien ne va plus.
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Tes chevilles restent bloquées, tes genoux grincent, ton bassin ne tourne plus, tes épaules couinent au moindre mouvement. En plus, la veille, pendant le match, tu t’es bien rendu compte que ce putain de terrain devenait beaucoup trop grand et que cette saloperie de ballon ovale devenait de plus en plus petit, c’est que t’es prêt nom de Dieu !
« Prêt à faire le grand saut »
Prêt à faire le grand saut et à changer de catégorie. L’équipe 3 t’attend à bras ouverts. Elle n’attendait même plus que toi pour faire le quinzième. Bien sûr, le niveau n’est plus le même et le rugby proposé est quelque peu adapté aux pratiquants.
Un rythme moins soutenu, des placages moins appuyés, des cadrages débordements calculés et mesurés, des mêlées simulées. Néanmoins, la fourchette discrète et la timide torsion de testicule sont tolérées, (si celles-ci sont pratiquées dans l’esprit).
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Mais tu devras savoir qu’il te faudra toutefois oublier tes moments de gloire et de notoriété. L’équipe 3 joue dans l’anonymat du dimanche matin, sur des terrains éloignés des grandes tribunes. Ignorée des supporters, snobées par les dirigeants, elle survit loin des foules et des petites culottes jetées par quelques groupies préférant le jeune musclée au vieux renard.
« Le short n’est pas fourni »
Mais n’importe, tant que le plaisir persiste, il n’y a pas de mal à se faire du bien. Evidemment, le maillot n’y est pas moulant, et c’est tant mieux pour certains. Le short n’y est pas fourni et il faut bien souvent sortir le porte-monnaie pour se vêtir et se nourrir à peu près décemment.
Malgré cela, cette équipe de vieux joyeux drilles ne connait pas la défaite et ce, depuis la vie des rats. Rien que la victoire ! Alors pour remédier à cette énigme rugbystique, nos vieux guerriers chauves et boiteux ont décidé d’aller défier d’autres tout aussi vieux et bancals du côté de Barcelone en 2015.
Sûr d’y connaitre enfin la défaite pour voir ce que ça fait (un peu comme les Normands dans Astérix avec la peur). Haaa, je rêve déjà de voir la tête des Catalans en voyant Toto se jouer des trois-quarts adverses d’une feinte de passe lumineuse.
« Finisseur de fût »
J’imagine la tête des adversaires de toutes nationalités devant la fulgurante passe d’un Raph rajeuni de 20 ans par l’événement. Et les accélérations de Freddy (28 secondes au 100), les crochets dévastateurs (et sans claquage) de Yannick, les plaquages (sans acromio) de Marco, les prises de balles aériennes (sans mauvaise retombée) de Tige.
Et que dire de la puissance d’Eric, redoutable finisseur… de fût. Non, vraiment la 3 ce n’est que du bonheur. Du bonheur de se retrouver, histoire de transpirer 80 minutes et de se dépêcher d’aller vite reprendre les calories perdues autour d’une bonne table où les crudités sont interdites et la viande rouge fortement conseillée.
Penses-y, jeu qui te croit invulnérable et encore opérationnel. Commence donc à te préparer à rejoindre ces vétérans du club et tenter de ralentir la fin de ta carrière le plus longtemps possible. »
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