« Ces faits sont le fruit d’une particulière immaturité. Il ne va pas aimer que je dise ça, mais c’est un véritable petit gamin ». Pour Me Etienne Noël, si son client âgé de 20 ans a incendié le centre des impôts de Eu dans la nuit du 1er mars 2019, c’est avant tout parce qu’il manque de maturité.
À la barre du tribunal de Dieppe lundi 1er avril 2019, c’est un jeune homme penaud qui s’explique. Cela fait un mois exactement qu’il a jeté un cocktail Molotov dans le centre des impôts de Eu et depuis son geste, il dit avoir pris conscience de la gravité des faits : en garde à vue, d’abord, où il est resté 48h, puis en prison, où il a été placé pendant 15 jours en détention provisoire avant d’être placé sous contrôle judiciaire.
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Quand il explique son geste, Antoine semble d’abord décrire une grosse bêtise. Le président du tribunal lit les déclarations qu’il a faites en garde à vue : « Un collègue m’a appelé pour qu’on se voit. Je n’avais rien de prévu. Je lui ai dit que je ne souhaitais pas boire parce que je conduisais. Nous sommes allés dans le parc du château d’Eu pour discuter. Là, on a reparlé de mon amende et j’ai eu l’idée d’incendier le centre des impôts ». L’amende dont parle Antoine, de 200€, lui a été délivrée une dizaine de jours plus tôt. « Mon ami m’a donné sa bouteille [de vodka, achetée quelques heures plus tôt au supermarché], je l’ai remplie avec de l’essence qui servait à la tondeuse de mes parents. J’ai aussi pris un caillou chez eux et devant les impôts, j’ai jeté le caillou, l’alarme a sonné et j’ai jeté la bouteille ».
Les circonstances sont accablantes pour Antoine selon le procureur de la république : « Il a été interpellé le 6 mars mais avant cela, il n’est pas venu se dénoncer. Par ailleurs, cet acte n’est pas perpétré de manière soudaine. Il a été préparé, et son projet était en gestation depuis qu’il a dû payer cette amende. Il a réfléchi au cocktail Molotov, a pris une bouteille, un chiffon, de l’essence et aussi un caillou au domicile de ses parents, parce qu’il savait qu’il y avait une porte vitrée au centre des impôts ».
Le procureur contextualise également les faits : Antoine est un gilet jaune actif. Il anime une page Facebook et a participé à plusieurs manifestations, dans les Villes Sœurs et à Amiens. « Il ne rattache pas son geste aux gilets jaunes, mais il y a ce contexte d’hostilité à l’État et aux administrations ». Il requiert 12 mois d’emprisonnement, dont 6 mois ferme.
Son avocat plaide l’immaturité et l’influence extérieur :
Dans les manifestations, on se fait influencer par des gens qu’on ne retrouve jamais, ces fameux black blocs. L’influence qu’il a pu subir, c’est le nœud du problème. »
Il a finalement été condamné à une peine de 6 mois de prison dont 4 avec sursis et mise à l’épreuve pendant 2 ans, avec obligation de travail, d’un suivi psychologique et d’indemniser les victimes. « La peine ferme est aménageable » précise le Président du tribunal. Il devra aussi verser 1€ symbolique pour préjudice moral à la Ville d’Eu et 450€ pour les frais d’avocat. L’autre action civile de la direction générale des finances a été renvoyée au 11 décembre, le préjudice n’ayant pas encore été estimé.