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Politique. Clotilde Valter : « Ma seule ambition a toujours été simple : être utile »

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« Quant à savoir si je serai candidate aux municipales à Lisieux ou sur une liste, je n'ai pas la réponse aujourd'hui. »

« Quant à savoir si je serai candidate aux municipales à Lisieux ou sur une liste, je n’ai pas la réponse aujourd’hui. »

Vous n’avez plus de mandat d’élue, que faites-vous ?

J’ai repris mon activité professionnelle. La même depuis 31 ans au ministère de l’Intérieur. Mais j’habite toujours à Lisieux, à Hauteville. C’est mon quartier depuis vingt ans, un quartier où l’on se sent bien. Et je n’ai pas l’intention de déménager.

« On ne sait plus qui décide quoi »

Avec le recul de ce mouvement qui a commencé le 17 novembre, comment analysez-vous la colère des Gilets Jaunes ?

Il y a un mouvement de fond qui vient de loin, une demande de plus de justice et une perte de confiance dans la démocratie, les élus et les corps intermédiaires. Les citoyens ne se sentent plus représentés. La mondialisation et la décentralisation ont brouillé le paysage : on ne sait plus qui décide de quoi. Les citoyens ont compris que les décisions se prenaient ailleurs, ils se sentent dépossédés de leur citoyenneté. Avant le 17 novembre, on n’imaginait pas que l’initiative des Gilets Jaunes puisse prendre cette ampleur.

La colère avait commencé avec les 80 km/h mais l’augmentation des taxes sur le carburant a fait déborder le vase. Le Gouvernement a laissé traîner la situation, comme si c’était une protestation banale. L’absence d’expression du Président de la République alors que le mécontentement se cristallisait sur sa personne a été ressenti comme du mépris. Mais il y a aussi un profond malentendu entre Emmanuel Macron et une partie de l’électorat qui a voté pour lui lors de l’élection présidentielle.

Ces citoyens disent qu’ils n’ont pas voté pour lui mais contre madame Le Pen. Quand il explique qu’il applique le programme pour lequel il a été élu, le Président de la République leur donne le sentiment qu’il les ignore. Car ils n’ont pas voté pour ce programme. Ils ne se retrouvent pas dans la politique qui est menée. Et Ils ont l’impression que le Président ne s’adresse pas à eux mais seulement à ceux qui réussissent, aux plus riches et qu’il ne les prend pas en considération dans son projet, alors qu’il est le Président de tous les Français.

 

Avez-vous l’impression que le Président de la République est parfois sorti de son rôle, notamment avec des propos qu’il n’aurait pas dû tenir ?

Le Président ne parle pas à tous les Français. Certaines expressions ont fait mal : « un pognon de dingue », « il suffit de traverser la rue pour trouver du travail ». En pleine crise, affirmer que quoiqu’il arrive, on gardera le cap pose problème. Emmanuel Macron n’a pas les mots contrairement à ses prédécesseurs. Les Gilets Jaunes sont sa première épreuve. Il ne l’a pas vue venir et l’a sous-estimée…

 

Le débat qui vient de se mettre en place, vous en pensez quoi ?

Ce débat est nécessaire pour que notre pays retrouve l’apaisement. En démocratie, il doit y avoir de l’écoute, des échanges et après, on décide. Or le pouvoir actuel est vertical. Le Président décide seul. Le Gouvernement ne pèse pas. Les parlementaires de la majorité ne relaient pas les préoccupations du terrain. Les corps intermédiaires ont été volontairement écartés. Il n’y a pas de dialogue régulier avec les partenaires sociaux, les élus et les partis politiques. Pas de concertation suffisante avec eux sur les décisions prises. Dans la crise, le Président s’est retrouvé, de fait, isolé. Le grand débat national est très important. Il faut s’écouter, se parler, dialoguer pour avancer. La question qui se pose est : « qui va décider de ce que l’on retient et de ce que l’on ne retient pas ?». Il serait mal venu que le Président de la République décide seul. Après la synthèse des débats, il faudra une concertation, une conférence sociale avec les partenaires sociaux et les associations d’élus pour décider de ce qui va être proposé aux Français.

« Le Président a exclu les classes moyennes »

Remettre l’impôt sur la fortune pourrait être une mesure forte ?

L’ISF est une mesure symbolique. Emmanuel Macron a commis une grave erreur au début du quinquennat : au moment où il augmentait la CSG sur les revenus modestes et les petites retraites, il supprimait l’impôt sur la fortune. D’où le reproche d’un Président qui fait payer les plus modestes au profit des plus riches. Le Parti Socialiste a lancé un référendum d’initiative partagée pour rétablir l’ISF. Il faut pour l’organiser le soutien de 185 parlementaires, 10 % du corps électoral, soit 4,7 Millions de signatures.

 

Les mesures proposées par le Président de la République suffiront-elles à calmer la colère ?

Les Gilets Jaunes demandaient des mesures de pouvoir d’achat. En écartant l’augmentation du Smic au profit de la prime d’activité, le Président a exclu les classes moyennes. Pour la CSG, les retraités ont apprécié l’augmentation du seuil à 2000€. Après les annonces de décembre, le message était : « des décisions ont été prises, circulez, il n’y a plus rien à voir ! » Nous constatons aujourd’hui que le mal est plus profond et que les réponses apportées ne suffisent pas. Le Président a dû en tirer les conséquences.

« Cela pollue le débat public »

Les municipales à Lisieux, y prendrez-vous un rôle important ?

Le petit jeu des municipales a été lancé dès le lendemain des législatives. Cela pollue le débat public. Nos concitoyens en ont marre de ces élus ou candidats permanents qui donnent souvent l’impression de vouloir, avant tout, un poste. C’est aussi ce qui abîme notre démocratie aujourd’hui. Nos concitoyens veulent que leurs élus travaillent et ne soient pas en permanence en campagne. Quant à savoir si je serai candidate aux municipales à Lisieux ou sur une liste, je n’ai pas la réponse aujourd’hui. C’est bien trop tôt. La question que je me pose n’est pas « serai-je candidate ou pas ? » mais : « de quoi cette ville et ce territoire ont-ils besoin ? qu’attendent les Lexoviens ? Est-ce que je peux être utile d’une façon ou d’une autre dans ce débat ou pas ? ».

 

 

Vous avez une belle expérience qui pourrait être utile ?

Certes ! J’ai travaillé avec Lionel Jospin ministre puis Premier ministre, j’ai été conseillère municipale, conseillère générale, députée, ministre. Aujourd’hui je fais mon métier, que j’aime et que j’ai choisi : servir mon pays, l’intérêt général et mes concitoyens. Ma seule ambition a toujours été simple : être utile.

LIRE AUSSI : Grand débat national : Clotilde Valter organise une réunion à Lisieux

Même si c’est loin d’être fait, il est question de réduire le nombre de circonscriptions et par conséquent de députés. La 3e et 4e, c’est à dire Lisieux-Falaise et Pont-L’Evêque pourraient être réunies ?

Avec des circonscriptions de 230 000 habitants, les élus seront inaccessibles. La troisième circonscription, dans sa configuration actuelle, est déjà très vaste. Ce projet va encore faire perdre de la proximité. Alors qu’il faut donner la parole aux citoyens et construire le dialogue localement cette réforme va les priver de contact avec les parlementaires chargés de les représenter. C’est n’importe quoi !

« Impatience et inquiétude à Hauteville »

Vous habitez Hauteville, un quartier qui vous tient à cœur. Quel est votre avis sur le projet de rénovation urbaine ?

Nous avons modifié la loi pour que des villes moyennes comme Lisieux puissent bénéficier de ces fonds publics sur un seul critère : le revenu des habitants. C’est un superbe projet, nécessaire et réclamé depuis longtemps par les habitants. Aujourd’hui il y a de l’impatience dans le quartier : « c’est pour quand ? » et de l’inquiétude : « mon logement est-il concerné ? ». Ces inquiétudes sont légitimes.

Il a été annoncé que plus de 650 logements seraient détruits. C’est beaucoup trop. De leur côté, les bailleurs ont anticipé sur le processus et demandent déjà aux habitants de déménager. D’où les questions : « où vais-je aller ? », « qu’est-ce que je vais faire ? », « combien je vais payer pour mon nouveau logement ? ». Je me suis battue pour que Hauteville puisse bénéficier de cette rénovation. Mais il y a une exigence : la mixité sociale, atout du quartier depuis l’origine, doit être au cœur du projet et les nouveaux logements doivent bénéficier aux habitants. Or on peut craindre aujourd’hui que certains veuillent rompre avec cette culture historique qui faisait sa force et celle de notre Ville.


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