Marianne, 63 ans, a commencé le cinéma en 2013. (©AS Hourdeaux/Croix du Nord)
Dans le film « Les invisibles » qui sort ce mercredi 9 janvier 2019, elle est « Lady Di », une des femmes sans domicile fixe qui vient chercher chaleur, réconfort et espoir auprès de Corinne Masiero et Audrey Lamy. Un rôle que la Nordiste Marianne Garcia, 63 ans, a failli refuser, car cela lui évoquait trop sa propre expérience.
Enfance Cosette
Rien ne prédestinait Marianne à devenir actrice. Son enfance, c’est pire que Cosette. Et pourtant, elle n’est pas née dans un quartier défavorisé ni dans une famille du quart-monde.
Elle a grandi dans une maison bourgeoise de Croix, qui est devenue un taudis. À la mort de son mari, la mère de Marianne devient une loque, alcoolique et maltraitante, quand elle ne laisse pas ses deux plus jeunes filles seules des semaines entières.
Les voisins nous nourrissaient en laissant des assiettes devant la porte, comme pour des chiens. Glacées l’hiver, pourries l’été… »
Dormir au cimetière
À partir de 7, 8 ans, Marianne est livrée à elle-même, devant parfois même dormir dehors. « J’avais mes habitudes dans les chapelles du cimetière. Un jour d’hiver, la porte a gelé, je n’ai pas pu sortir pendant un jour et une nuit… »
Elle se souvient des coups aussi, avec un tisonnier parfois, de la faim. Et de l’absence, surtout. « J’ai été libérée quand ma mère est morte. J’avais 17 ans ».
Peu après, elle rencontre celui qui deviendra son mari, son sauveur. 44 ans de mariage aujourd’hui.
La joie de vivre malgré tout
Parfois, son regard s’embrume, comme celui de son mari, qui n’est jamais loin. Mais la tristesse, ce n’est jamais pour longtemps. Car Marianne, c’est la joie de vivre et d’aimer, malgré tout ce qu’elle a connu.
Elle n’en veut à personne. « Sauf à ceux qui auraient pu aider ma mère et l’ont enfoncée ».
Et confie même :
Si c’est pour avoir ma famille aujourd’hui, 2 enfants et 5 petits-enfants merveilleux, ça valait le coup d’être malheureuse dans ma jeunesse ».
On vous l’avait dit, Marianne, c’est la force de vivre d’abord !
D’où lui vient ce caractère ? « J’avais ce potentiel en moi dès la naissance. Je suis une battante. Mes anges gardiens m’ont aidée… »
Elle sera vendeuse, son rêve, dans les papiers peints, puis dans un magasin de chaussures à Wattrelos. Sans oublier le bénévolat : elle fut hospitalière à Lourdes pendant 32 ans !
Les invisibles, un film en hommage aux femmes. (©J.C. Lother)
Ses débuts au cinéma
Le cinéma lui est tombé dessus par hasard.
J’adorais faire les castings de jeux télévisés. Un jour, je me présente pour un tournage de jeu à Comines. En fait, mon mari m’avait inscrite pour un casting de figurants pour un film ! »
L’aventure commence comme cela et lui donne envie de continuer. « Sur un tournage, tu es dans une bulle, tu es cocooné. J’adore, même si c’est très fatigant. Tu reçois de l’attention, de la reconnaissance, tout ce que je n’ai pas eu étant jeune… »
Garder la tête haute, le message du film
Pour les Invisibles, elle a pourtant hésité : « Cette histoire me renvoyait à ce que j’avais connu enfant. J’ai eu peur. Puis, je me suis dit que ce serait un exutoire. Le message du film est qu’il ne faut rien lâcher, qu’il faut garder la tête haute. Sourire, se mettre du rose sur les ongles quelle que soit la situation… »
Elle rejoint dans cette aventure une autre Nordiste dont c’est le premier film, Adolpha Van Meeraeghe.
Elle sait aussi qu’un film peut changer les choses. Elle rappelle qu’après le film Discount (où elle a joué en 2014), une loi anti-gaspillage est née pour éviter les destructions de nourriture par les centres commerciaux.
Avec les Invisibles, elle espère « qu’on dégagera les pics anti SDF sur le mobilier urbain et que l’action des travailleurs sociaux sera reconnue ».
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Tournage avec Arnaud Ducret
La carrière de Marianne ne s’arrête pas : elle est actuellement en tournage aux côtés d’Arnaud Ducret dans « Mine de rien », de Matthias Mlekuz. « Elle est pas belle, la vie ? L’amour, c’est la revanche sur la mort… »
Marianne Garcia a aussi tourné dans : « Claude libre » ; « Cowboy Camembert » ; « Vent du Nord » et « Discount ».